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Le sens des mots

Le 19/03/2017

J’ai entendu, en écoutant le livre audio « À toi », Pascal Janovjak (le correpondant de KimThuy) dire que les égyptiens avaient une relation différente avec les mots que notre civilisation actuelle. Il disait que pour eux les mots n’étaient pas des représentations des choses mais qu’ils « étaient » les choses et que cela leur donnait un effet. Il donne son interprétation de cette idée, qui est tout de même assez abstraite... Par exemple, les egyptiens ne parlaient de la lumière ou du soleil que lorsqu’ils la ou le voyait, ce qui faisait qu'en les nommant à l'aube, ils apparaissaient ce qui donnait l'effet (par opposition en parler la nuit n'aurait donc pas d'effet). Ainsi, ils ne parlaient, si je comprends bien, que des choses qui étaient là. Le soleil se lève, je peux t’en parler et plutôt que de te le représenter dans ton imagination, tu en prends conscience en le constatant toi aussi. Si je pousse le raisonnement, les égyptiens magnifiaient donc le moment présent? S’ils ne mettaient en mots que ce qui était là, les conversations devaient se restreindre à maintenant, au vécu direct… Imagine, si nous faisions la même chose aujourd’hui, combien de nos discussions contemporaine, axées sur les rêves, sur la commémoration des beaux moments passés, ou sur la prédiction de ce qui sera peut être, devraient être tues...? Combien avares de mots seraient les journées et les échanges entre les gens!!! Au début, je me suis demandé si c'était peut être à cause de cela que les mots, aujourd'hui, avaient perdu de leur sens... mais rapidement je me suis convaincu qu’avec ce principe, il n’y aurait pas de littérature, pas de plaisir des mots, qui comme la musique ou les odeurs, peuvent créer de toute pièce des émotions fortes, réelles, et réalistes. Je réfutais donc totalement cela en me disant que ce serait bien plate de n'utiliser les mots que comme cela.

Pourtant ce matin, en me réveillant, et en me demandant comment te dire bonjour à travers un petit courriel, seul lien « réel » qui m’attache à toi dans ces journées distantes, j’ai cru comprendre quelque chose. Je me demandais vraiment comment te dire bonjour sans teinter l’amour et la joie que j’avais de t’écrire par de la mélancolie et du manque. Pas que je ne ressente pas ces deux émotions, loin de toi je les vis, mais plus que ce n’est pas le message que je voulais envoyer. Je voulais juste te dire bonjour, je t’aime et bonne journée. J’ai essayé plusieurs formules et, toujours, je les ai reprises en me disant que la teinte mélancolique apparaissait encore… Devant ce constat, je me suis vraiment poser la question de pourquoi je n’y arrivais pas? Pourtant, me suis-je dit, lorsque je suis dans tes bras, en face de toi dans ton bureau, ou parfois aussi en toi, et que je te dis « je t’aime », je ne me pose pas la question… je sais que c’est clair, que je l’ai dit sans teinte, et que ces mots ne transportent pas de valise de mélancolie avec eux. Ils expriment juste ce qui est là et que mon corps, mes yeux incarnent… Et toi tu peux voir ces mots autant que les entendre, car ils ne décrivent pas quelque chose qu’il faut se représenter, qu’il faut imaginer, mais ils décrivent quelque chose qui est, ces mots "sont".

J’ai alors réalisé à quel point, les mots « je t’aime » peuvent être différents s’ils sont écrits et qu’ils représentent un sentiment que je veux que tu comprennes, ou s’ils sont partagés au moment où tout est là pour incarner leur réalité. - Les mêmes mots, un sens très différent- . Plein de questions me sont alors venues et devant leur nombre (et peut être la peur de connaitre certaines réponses) j’ai préféré sortir du lit et me faire un café pour ne pas rendre trop sérieux ce dimanche matin ensoleillé. Parmi ces questions figuraient « lui dis-je trop souvent je t’aime? » « le dire si souvent fait-il perdre de la valeur à ces mots? » « le moment où ces mots sont prononcés n'est-il pas important sur la valeur qu’ils ont? » « n’y a t-il pas en fait peu de bons moments pour dire les mots et s’assurait qu’ils aient leur effet, qu’ils incarnent ce qu’ils sont? » Mais tout cela sera peut être pour un autre billet, une autre discussion.

Pour ce matin il ne restera que : Bonjour, je t’aime et je te souhaite une belle journée.

 

Ps : J’aime entré dans l’intimité de ces deux personnes en écoutant ces mots, ces pensées qu’ils échangeaient sans pudeur dans leur correspondance. J’ai vraiment envie de faire la même chose avec notre kamishibai. Pas pour le publier, mais plus pour avoir une trace, un souvenir physique de tout cela. Sélectionner des passages, des textes, chronologiquement, que nous nous sommes écrits pour montrer que cela était vrai, ne jamais oublier quels ont été nos échanges et quelle a été leur puissance. Je vais surement le faire un jour, en 2 exemplaires…