Avoir une mémoire d'écureuil, c'est oublier les dates de fête de ses proches, c'est manquer un rendez-vous chez son garagiste, c'est ne plus savoir la fin d'un film qu'on a déjà vu deux fois, mais c'est aussi ne plus se souvenir ce qu'est une peine d'amour.
J'avais oublié comment c'était douloureux. Un malaise perpétuel qui nous accompagne quoi qu'on fasse. Si à certains moments de la journée, concentrée à l'accomplissement d'une tâche, j'oubliais presque la situation, le sentiment de mal-être, lui, persiste en trame de fond, bien présent en moi pour me rappeler à la réalité. Là, soudain, ma mémoire se souviens. Je suis en peine d'amour.
Si je l'aime, mais que je ne l'ai pas choisi, ai-je droit d'être en peine d'amour? Je ne sais pas, mais à ce point ci, je m'en fous. Anyway, je suis condamnée au silence, à ravaler ma tristesse, ma douleur, mes mots d'amour que tu n'auras jamais, mes sénarios de vie commune, mes désirs, mais aussi ma honte. Je dois enterrer tout ça bien profondément.
Je sais que ce n'est que le début. Le malaise s'est logé en moi pour un bon bout. Il accompagnera l'effort constant pour cheminer. Qu'est-ce ça veut dire ça? Tenter d'oublier ou encore de me convaincre de ma décison... Je ne le sais pas encore.
Ma mémoire d'écureuil m'a aussi fait oublier le bordel que fait la jalousie dans une tête. Les scénarios destructeurs qu'elle nous pousse à construire, la haine qu'elle fait monter en nous, les violences qu'elle nous amène à nous faire... J'avais oublier, et c'était une bonne chose.
Je me doute que t'es là aussi, en peine d'amour. La situation est ridicule, je sais. S'aimer, et être, tous les deux, en peine d'amour. Je t'entends me le dire...
Tout ça est ma faute, je le sais ça aussi. J'en suis désolée. Je suis désolée de ne pas assumer complètement cet amour, et de fonder mes choix sur de mauvaises raisons. Je vais te foutre la paix, te laisser m'oublier, ne t'inquiète pas. Ta vie ira mieux après moi. Pour ça aussi, ne t'inquiète pas.
Et soudain, alors que je prends conscience de la fin, ma vie devient à nouveau banale...