L'envie de te faire plaisir est présente. Lorsque je pense à toi, je ressens instantanément du bonheur. J'ai alors envie de le partager, mais surtout, j'ai envie de le partager avec toi. J'aimerais pouvoir te faire plaisir, te dire que tu m'apportes de la joie, t'offrir de petites attentions, te dire des mots doux, faire ensemble une activité que tu aimes... Bref, j'aimerais te rendre aussi heureux que tu sais me rendre. Mais, je suis confrontée à deux obstacles.
Premièrement, je ne sais pas vraiment ce qui te rend heureux, ce que tu aimes manger, boire, faire, regarder, sentir, écouter. Je te connais de mieux en mieux, mais j'ai encore l'impression d'en connaître si peu. La raison est simple: on a peu d'occasions de se connaître en dehors du monde virtuel. Ce qu'on se partage, on le choisit. Chaque chose qu'on se dit passe en quelque sorte à travers un filtre visant à ne retenir que ce qui nous semble intéressant, que ce qui mérite d'être écrit. Chaque élément partagé requiert un "effort", un arrêt devant notre clavier, un travail mental pour trouver les bons mots au risque de mal dépeindre une situation ou qui l'on est. Et par-dessus tout, ce que l'on partage, c'est décrit à travers nos propres yeux. Bref, nous ne sommes jamais ensemble dans des situations de la vie courante. Des situations banales, comme faire ensemble l'épicerie, choisir un film ou encore marcher dans le centre-ville le soir en regardant les vitrines des boutiques. Des situations qui me permettraient de mieux te connaître, de savoir ce qui t'anime, ce qui te fait rire, ce qui te fait craquer ou qui te surprend. C'est agréable d'apprendre à connaître l'autre. Mais là, il y a cette barrière, cet écran, qui rend les choses difficiles.
Le second obstacle qui freine mes envies de te faire plaisir, c'est la crainte de te faire souffrir. En te partageant le bonheur que tu me procures et en voulant te faire plaisir, j'ai l'impression de t'attirer vers moi, sur un chemin qui pourrait ne mener nulle part. Nulle ne sait où il mène ce chemin, c'est ça le problème. Considérant notre indécision et le risque que cette situation ne mène à rien, je crois que te faire plaisir relèverait davantage de l'égoïsme que de la bonté. Chaque fois que j'ai envie de te partager un sentiment de tendresse qui te revient, un compliment ou des mots qui traduiraient mon attachement certain envers toi, je pèse les répercussions de mon geste. En fait, je tente de le faire. Parce qu'en réalité, je ne sais pas vraiment l'effet que ça te fait et si ma lecture de la situation est juste. Mais, si souvent j'arrive à retenir, ou du moins, modérer mes propos, j'échoue parfois et je te livre alors mes pensées d'une façon spontanée. Je te les livre même si elles débordent d'amour et qu'à cause de cela, je devrais les garder pour moi, pour éviter de nous faire du tort et éviter de te procurer un plaisir momentané qui se transformerait rapidement en souffrance.
J'arriverai un jour à te faire plaisir sans te faire souffrir. Mais la situation actuelle peut transformer tout. Même le beau et l'innocent peuvent devenir souffrance. Notre situation, encore trop instable, rend le partage du plaisir hasardeux. Je veux que tu sois heureux, mais je ne veux pas être à l'origine de ton bonheur pour ne pas te faire souffrir. Ça semble être un non-sens: comment faire plaisir à quelqu'un pourrait-il le faire souffrir? Pourtant, je sais que le risque existe. La souffrance ne se cache pas très loin du plaisir dans une situation comme la nôtre. Je ne veux pas risquer de t'offrir de beaux cadeaux qui pourraient s'avérer vides, et provoquer après coup la souffrance. Alors, je m'abstiens de te partager ce qui, je crois, pourrait te faire plaisir.
Je te partage tout ça pour te dire que l'envie de te faire plaisir est bien présente, mais que je ne veux pas le faire pour ne pas qu'on souffre. Un jour, par contre, je le ferai. Un jour...